Cet article est le huitième dans la série “ Professeur Grudem vous répond”. D’un côté, une crédulité et naïveté de beaucoup sont un triste fait dans notre milieu hyper-charismatique où tout ce qui revêt un costume surnaturel est accepté sans discernement ni jugement. D’un autre, une gamme de sentiments allant de la méfiance à l’incrédulité devient plus caractéristique que jamais chez ceux qui ont été victimes de déception et de duperie dans le domaine des dons surnaturels. Avec un désir de contribuer à établir un équilibre biblique dans ce domaine, cette série est un effort modeste pour aider ceux qui luttent et qui s’interrogent.

Wayne Grudem est l’un des meilleurs théologiens reformés. Il a eu son Baccalauréat à la prestigieuse Université de Harvard, puis son Master of Divinity à Westminster Theological Seminary avant de décrocher son Doctorat à la prestigieuse Cambridge University. Il occupera la chaire du Professeur-Chercheur en Théologie et Bible à Trinity Evangelical School pendant 20 ans puis à Phoenix Seminary dès 2001 avant de recevoir les honneurs d’un Professeur Distingué en 2018. En plus d’être auteur des plusieurs bestsellers, il est un des grands cerveaux derrière la traduction de la Bible NIV (Nouvelle Version Internationale) et l’Editeur Général de ESV (The English Standard Version) Study Bible. Il fut également président de l’Evangelical Theological Society. Les questions sont formulées dans l’esprit de s’identifier à ceux qui cherchent honnêtement des réponses mais marchent encore dans la confusion et les réponses sont basées sur trois livres de Wayne Grudem :

The Gift of Prophecy in the New Testament and Today, Crossway, 2000

Are Miraculous Gifts for Today? Four Views(editor), Zondervan, 1996

Systematic Theology, Intervarsity & Grand Rapids, 1993

Question : Puisque Paul dit qu’une personne qui parle en langues « s’édifie » (1corinthiens 14 :14)), ne vaut-il pas mieux éviter les langues et rechercher d’autres dons qui édifient l’église ?

Réponse : Cette objection suppose à tort que nous ne devrions jamais faire des choses pour nous édifier. Mais c’est certainement faux. Nous devrions lire nos bibles quotidiennement, prier, chercher à grandir dans la sainteté, etc. Au fur et à mesure que nous grandissons dans la maturité chrétienne, nous sommes mieux en mesure de servir le Christ et d’édifier son église.

Cette objection fait aussi l’erreur de tirer une conclusion qui est contraire à la propre conclusion de Paul dans ce chapitre même. Bien que Paul mette en garde contre l’utilisation des langues sans interprétation dans l’église, il la considère certainement comme positive et l’encourage en privé. Il dit : « Celui qui parle en langues s’édifie lui-même, mais celui qui prophétise édifie l’Église » (1Corinthiens 14 :14).

Quelle est la conclusion de Paul ? Ce n’est pas (comme certains le diraient) que les chrétiens devraient décider de ne pas utiliser le don ou décider qu’il n’a pas de valeur lorsqu’il est utilisé en privé plutôt . Il dit-il dans Corinthiens 14. « Que dois-je faire ? Je prierai avec l’esprit, mais je prierai aussi avec l’intelligence » (v.15). Il ajoute, « Je remercie Dieu de ce que je parle en langues plus que vous tous » (V.18) ; Maintenant je veux parler en langues, mais encore plus prophétiser » (v 15).

Comment le parler en langues édifie-t-il celui qui parle ? Selon 1 Corinthiens 14 : 2, « Celui qui parle en langue ne parle pas aux hommes, mais à Dieu » ; cela implique que la personne qui parle en langues offre une prière ou des louanges à Dieu – même si son esprit ne comprend pas ce qui est dit (1 Corinthiens 14 :14-17). Au contraire, la prière ou la louange vient du propre esprit humain de l’orateur et communique directement avec Dieu (1 Corinthiens 14 :2). Si tel est le cas, nous nous attendrions certainement à ce que l’édification suive. Tout comme la prière et l’adoration en général nous édifient lorsque nous les pratiquons, de même ce genre de prière et d’adoration nous édifie aussi, selon Paul.

Question : J’ai entendu des histoires de personnes qui parlaient en langues et j’ai découvert plus tard qu’il s’agissait d’une contrefaçon démoniaque – un démon parlait à travers elles et prononçait des blasphèmes contre Christ dans une langue inconnue. Ce danger ne devrait-il pas nous avertir de ne pas parler en langues aujourd’hui ?

Réponse : Nous devrions reconnaître d’emblée qu’il peut y avoir une erreur dans le raisonnement derrière cette objection parce que Paul n’a exprimé aucune préoccupation à ce problème, même dans la ville de Corinthe où beaucoup étaient venus d’un milieu de culte païen au temple, et où Paul avait clairement dit : « Ce que les païens sacrifient, ils l’offrent aux démons et non à Dieu » (1 corinthiens 14 :20). Néanmoins, Paul dit ,« je veux que vous parliez tous en langues » (1 Corinthiens 14 :5). Il ne les avertit pas qu’ils risquent des contrefaçons démoniaques en parlant en langues !

La raison théologique qui sous-tend l’encouragement de Paul à ce stade est que le Saint-Esprit travaille dans la vie des croyants. Paul dit : « Je veux que vous compreniez que personne qui parle par cet Esprit de Dieu ne dit jamais ‘Jésus soit maudit !’  Et personne ne peut dire que Jésus est seigneur, si ce n’est par le Saint-Esprit » (1 Corinthiens 12 :3). Ici, Paul rassure les Corinthiens que s’ils parlent par le Saint-Esprit qui est à l’œuvre en eux, ils ne « seraient pas maudits »

Venant, comme il le fait au début d’une discussion, sur les dons spirituels, 1 Corinthiens 12: 3 est destiné à rassurer les Corinthiens qui ont peut-être soupçonné certains chrétiens issus de milieux de culte démoniaque dans les temples de Corinthe. Cette influence démoniaque pourrait-elle encore affecter leur utilisation d’un don spirituel ? Paul établit la règle de base selon laquelle ceux qui professent sincèrement la foi que « Jésus est Seigneur » le font par le Saint-Esprit agissant à l’intérieur, à savoir que personne ne parlant par le Saint-Esprit ne blasphèmera pas contre Jésus. Cette peur n’est donc pas celle qui semblait troubler Paul. Il a simplement encouragé les croyants à prier en langues et a dit que s’ils le faisaient, ils s’édifieraient eux-mêmes (1 Corinthiens 14 :4).

Que dirons-nous alors des histoires de chrétiens qui disent qu’ils ont parlé en langues pendant un certain temps et ont ensuite découvert qu’il y avait un démon en eux qui autorisait ce discours, et le démon chassé ? Ce ne sont que des exemples de cas où l’expérience doit être soumise à l’Écriture et testée par l’Écriture ; et l’enseignement de l’Écriture ne doit pas être une expérience. Nous devons veiller à ne pas laisser de tels récits d’expériences nous amener à adopter une position différente de celle de l’Écriture elle-même sur cette question.

Plus précisément, si 1 Corinthiens 12-14 considère les langues comme un bon don du Saint-Esprit qui est précieux pour l’édification et le bien des saints, et si Paul peut dire « Je veux que vous parliez en langues » (1 Corinthiens 14 :5), alors les interprétations d’expériences contemporaines qui disent en fait que je veux que vous ayez tous peur des langues, vont à l’encontre de l’emphase du Nouveau Testament.

La possibilité d’une contrefaçon démoniaque de chaque don existe certainement dans la vie des incroyants (voir Matthieu 7 : 22). Mais dans la vie des croyants, en particulier lorsqu’il y a du fruit positif dans leur vie et du fruit positif de leurs dons, ce sont de vrais dons. 1 Jean 4 :4 et Matthieu 7 :16-20 nous disent que ce ne sont pas des dons contrefaits, mais de vrais dons de Dieu. Nous devons nous rappeler que Satan et les démons ne font pas le bien, ils font le mal, et ils n’apportent pas la bénédiction; ils apportent la destruction (Jean 10 :10).