Pasteurs politiciens: contradiction ou simple oxymore
Il est tragique d'oublier que la politique même quand elle est faite par les chrétiens ne peut être que bandage sur la plaie qui n'éradiquera jamais la source de la misère de l'homme
Au Burundi, Il fut un temps où l'appartenance politique était perçue comme quelque chose qui trahissait le sens même de piété et de séparation du monde qui doit caractériser un chrétien spirituel. Puis vint un gouvernement « born again » en 2005, et la pendule oscilla vers l'autre côté où les enfants de Dieu doivent faire politique. Aujourd’hui il est devenu monnaie courante de marier politique et religion. Est-ce qu’un tel shift serait indicateur d'une Eglise parvenue à la maturité ou alors devrais-je déplorer une apostasie ?
Il m'arrive de vouloir sonder quelle idéologie ou théologie aurait informé et influencé un tel changement mais malheureusement ça ne fait pas partie de ce que je me suis proposé d'explorer aujourd’hui. Mon but est de trouver un juste milieu qui ferait justice à la phrase biblique que l'Eglise est "dans le monde" sans être "de ce monde" et espère prouver brièvement et modestement la véracité perspicace contenue dans cette phrase "Christianisme et Politique ne sont pas deux même choses et les confondre pourrait engendrer de terribles distordions. Mais couper tous les liens entre les deux occasionnerait de graves et pire distorsions." [1]
La priorité No1 du pasteur
Je crois qu'il est important de maintenir que la principale mission de l'Eglise est celle d'amener les gens à une relation juste avec Dieu à travers la Parole et l'Esprit. Il arrive qu’un pasteur se concentre presque exclusivement sur la justice sociale et l'action politique de telle façon que la Grande Commission de l'Eglise qui consiste à proclamer la repentance et le pardon à toutes les nations semble parfois relégué au second plan. C’est un fait triste que l’on a observé dans ce pays depuis quelques années. Je crains que dans les jours proches, L’Eglise du Burundi subisse de plus en plus de pression extérieure qui la détourne de sa mission principale. Si ce n’est pas déjà le cas ! Allons-nous tenir ? Il est tragique d'oublier que la politique même quand elle est faite par les chrétiens ne peut être que bandage sur la plaie qui n'éradiquera jamais la source de la misère de l'homme : Le péché
Si je me révolte contre la "socialisation" et la "politisation" de la mission de l'Eglise, je ne nie pas que l'Evangile ait obligatoirement des répercussions énormes qui sont de nature sociale et politique. La vraie évangélisation n'épargne aucun aspect de la vie humaine et n'ignore jamais la souffrance humaine. Je soutiens avec Carl Henry que" L'Evangile contient plus qu'une assurance du pardon divin et de la nouvelle vie. L'Evangile porte la semence de la dignité humaine et la liberté."[2] Nous avons des exemples de William Wilberforce, Dietrich Bonhoeffer, Martin Luther King qui ont eu une volonté forte et juste de donner un témoignage public de la liberté et la justice devant des dirigeants cruels, injustes. Leur courage intrépide nous confond, nous humilie et nous inspire. Mais la question subsiste toujours : comment l’Eglise puisse accomplir son mandat culturel sans trahir l’essence même de la grande Commission qui est la proclamation de l’Evangile ?
Eglise dans l’accomplissement de son mandat culturel.
J’aimerais suggérer trois moyens par lesquels l’Eglise puisse jour un rôle dans la vie politique du pays sans trahir sa mission principale qui est la proclamation de l’Evangile.
Réaffirmer notre priorité
Alors que l’Eglise accomplit son appel dans l’engagement socio-politique par ces trois moyens, il est toujours primordial de rappeler encore et encore la priorité de l'évangélisation et la conversion au-dessus de toute autre réforme sociale ou politique. Il est possible de se perdre en cours de route, alors qu’on avait si bien commencé. Ça s’est déjà produit.
Dietrich Bonhoeffer est un pasteur allemand qui a eu le courage d'affronter le régime d’Hitler et qui fut tué par les Nazis. Néanmoins il pouvait dire : " Dire aux hommes que la cause est urgente, que le royaume de Dieu est proche est le plus charitable et plus miséricordieux acte que nous puissions faire et la bonne et joyeuse nouvelle qu'on puisse apporter. » [3] Le théologien Emil Brunner abonde dans le même sens en disant " La tâche primordiale de l'Eglise n'est pas celle de créer, changer et améliorer l'ordre social. La tâche de l'Eglise se trouve au-delà de tout ordre social, parce que sa tâche est celle de prêcher l'Evangile de Jésus Christ, le Royaume qui transcende tous les ordres sociaux, qu'ils soient bons ou mauvais."[4]
Pour le chrétien, aucun gouvernement ou parti politique n'est ultime. Les chrétiens possèdent une loyauté commune qui transcende leur loyauté politique, une loyauté à un seul Roi et Seigneur. Ils attendent Celui qui viendra instaurer Son royaume de paix, justice et prospérité. Ils savent qu’en attendant, tout est, et restera, imparfait. Leur espérance ultime réside dans Celui qui bientôt viendra pour dire : Voici, je fais toutes choses nouvelles.
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[1] Anglican Theological Review, July 1973
[2] Cité dans Essentials of Evangelical Theology, p.168 par Donald Bloesch
[3] Dietrich Bonhoeffer, The Cost of Discipleship, p.188
[4] Cité par Donald Bloesch dans Essentials of Evangelical Theology, p.155
NIKIZA Jean-Apôtre est un Pasteur qui exerce son ministère depuis la ville de Bujumbura. Il est marié à Arielle T. NIKIZA et ensemble, ils sont pionniers du Mouvement des Hédonistes Chrétiens, Sa Bannière depuis 2015. Ils sont aussi co-fondateurs de Little Flock Ministries. La spiritualité chrétienne et le Renouveau spirituel de l’Eglise restent les grandes marques de leur appel commun. Les moments de loisirs de NIKIZA J-A incluent les films, la musique,le Basketball et un bon sommeil.
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